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n. 7-2014 - © copyright |
ROSA PERNA
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La détermination des sanctions
anti-monopole dans le système juridique italien (1)
J’essaierai d’apporter ma contribution à ce forum
en présentant le système juridique italien, en accordant une
attention particulière aux origines juridiques du droit sur la
concurrence avant d’aborder le sujet de la détermination des
sanctions anti-monopole.
1) Le droit à la libre entreprise a une
reconnaissance spécifique dans la Constitution italienne de 1947. La
Charte Fondamentale reconnaît explicitement, à son art. 41 la
liberté d’initiative économique des individus; ledit article établit
ce qui suit: “ 1 – L’entreprise économique à caractère privé est
libre. 2 – Celle-ci ne peut pas se faire contre le bien commun ou si
elle est susceptible de porter atteinte à la sécurité, à la liberté
ou à la dignité humaine. 3 –La loi mettra en place des programmes et
des contrôles adéquats pour que l’activité économique du secteur
public et privé puisse être orientée et coordonnée à des fins
sociales”.
Selon des opinions démontrées, le premier paragraphe
de la disposition octroie une garantie constitutionnelle du droit à
la libre entreprise comme un droit individuel alors que le troisième
paragraphe octroie des garanties constitutionnelles aux pouvoirs
publics pour qu’ils soumettent le droit à la libre entreprise ou son
exercice, quand celui-ci est inhérent, à l’intérêt public.
En
conséquence, dans la Constitution italienne, le concept de
concurrence, tel quel était au début omis. Dans la doctrine
académique, il est souligné, sans équivoque, que la liberté
d’initiative économique (à savoir, le droit à la libre entreprise)
ne comprend pas le principe de concurrence attendu que le premier
possède une extension “verticale” dans la mesure où il indique des
sphères d’action de l’individu protégé face à l’État; en revanche,
la concurrence implique une relation horizontale entre des chefs
d’entreprise, à savoir, des individus qui exercent la liberté
d’initiative économique.
De ce fait, la relation entre
l’art. 41 de la Constitution et les dispositions du Traité relatives
à la concurrence a été décrite comme la connexion entre un phénomène
subjectif et un autre objectif considérant que la règle
constitutionnelle réglemente la situation subjective de la liberté
individuelle tandis que la législation européenne exprime un modèle
de relations économiques et juridiques.
À posteriori, la Loi n°
287/1990 a fini par introduire des dispositions dans le système
juridique italien qui correspondent à celles présentes dans les lois
communautaires anti-monopole, lesquelles prétendent contraster la
modification de la concurrence sur le marché local ou dans une
partie importance de ce dernier. Conformément au libellé de l’art. 1
de la Loi, les dispositions sont adoptées au titre de l’art. 41 de
la Constitution relatif à la protection du droit à l’initiative
économique et l’interprétation de ces dispositions mêmes devra se
faire conformément aux principes de la législation communautaire en
matière de réglementation anti-monopole.
C’est ici qu’apparaît la
première tâche du Juge qui doit conjuguer le libellé du précepte
constitutionnel (expliqué par la loi nationale anti-monopole) avec
la substance de la loi anti-monopole de l’UE (qui doit être rappelée
quand le Juge interprète la loi nationale), c’est-à-dire que quand
sa discrétion judiciaire est utilisée pour réviser l’utilisation de
la discrétion technique appliquée aux lois anti-monopole contestées.
Éventuellement, quand la Loi constitutionnelle n° 3/2001 a
réformé le Titre V de la Constitution, elle reconnaît explicitement
le principe de la concurrence en insérant la “protection de la
concurrence” sur la liste des matières réservées exclusivement au
pouvoir législatif de celle-ci; comme conséquence, le “marché” a
incorporé la Constitution italienne comme valeur positive pour la
promotion de l’efficacité économique et
organisationnelle.
L’affirmation constitutionnelle du principe de
la concurrence a donné une base constitutionnelle claire et
distinctive concernant la loi anti-monopole; en plus, toutes les
restrictions de la dérivation européenne en la matière devront être
respectées sur la base du précepte constitutionnel de la part du
législateur national et régional. D’où le fait que toutes les lois
et réglementations anti-monopole que le juge national doit appliquer
aussi bien ceux d’origine nationale qu’européenne, tirent leur
origine ou ont une reconnaissance directe dans la loi fondamentale
de l’État.
À l’Autorità Garante della Concorrenza e del
Mercato (Autorité Garante de la Concurrence et du Marché) est
confiée la protection de la concurrence dans le système juridique
italien ce qui fait qu’il lui revient une large compétence globale
(en matière de contrats et d’abus de positions dominantes: pour
mener à bien des enquêtes, engager des procédures, découvrir des
infractions, découvrir et imposer des sanctions; et en matière de
fusions et d’acquisitions: pour suspendre provisoirement la
concentration et imposer des sanctions).
Il convient de
mentionner que les dispositions légales (art. 35, 1er alinéa du
Décret de Loi du 6 décembre 2011, n° 201) octroient aussi à
l’Autorité anti-monopole une capacité spéciale dans les procédures
judiciaires pour former des recours contre des lois administratives
générales, de réglementation ou particulières d’autres
administrations publiques qui violent les règles sur la protection
de la concurrence et du marché.
Avant d’aborder les cas
spécifiques soulevés, nous devons nécessairement prendre en compte
le processus d’harmonisation de la loi de la concurrence de l’UE,
qui a été créée par le passé et qui a fait que la Commission et la
Cour de Justice, dans une interaction constante, jouent un rôle
prépondérant dans la croissance des autorités anti-monopole ainsi
que dans les juridictions existantes au sein des États
membres.
En conséquence, les juges nationaux sont devenus partie
intégrante du système qui englobe les juridictions de tous les États
membres qui utilisent la jurisprudence de l’Union Européenne comme
cadre de référence.
2) Concernant l’établissement des sanctions
pour infractions aux lois anti-monopole, au titre de l’art. 15 de la
Loi 287/90 – en cas de violations graves –, l’Autorité Nationale,
prenant en compte la gravité et la durée de ces dernières, imposera
l’application d’une sanction administrative à caractère pécuniaire
qui pourra aller jusqu’à 10% de la valeur de la facturation obtenue
par chaque entreprise ou entité pendant l’exercice financier
préalable avant la notification des objections de la part de l’État,
déterminant la date limite pour le paiement de la sanction précitée.
Il n’existe pas de lignes directrices nationales pour déterminer
les sanctions. L’Autorité Nationale a souvent recours aux lignes
directrices européennes en la matière. À cette fin, le Conseil
d’État (le juge administratif de deuxième instance) a déclaré que
les “lignes directrices fournies par la Commission Européenne pour
déterminer les sanctions en cas d’infractions anti-monopole ont une
simple valeur indicative et ne sont pas contraignantes et en aucun
cas, elles n’évitent une évaluation intégrale de l’infraction mais
la favorisent plutôt” (Conseil d’État, VI, déc. 9306/2010).
Il
convient de prendre en compte que le “principe de proportionnalité”
de la sanction, dans son application pratique à la procédure de
sanctions est un fait qui a suscité certains doutes et a provoqué
certaines critiques de la part des entreprises toutes les fois que,
ce principe n’a prétendument pas permis de matérialiser un
“traitement égalitaire” des participants à la même entente. Dans ce
but, le juge administratif a eu à assumer une notion de
proportionnalité qui ne coïncide pas avec le sens mathématique et à
valider le mécanisme logique utilisé par l’Autorité de la
Concurrence à l’heure de déterminer les sanctions.
Nous trouvons
un exemple illustratif de cette attitude dans la décision nº
9575/2010 du Conseil d’État (dans l’affaire “Jet Fuel”) qui est
parvenue aux suivantes conclusions concernant la détermination des
sanctions infligées aux ententes:
- l’Autorité anti-monopole a la
légitimité pour regrouper les opérateurs au sein de classes
dimensionnelles homogènes du fait de la nécessaire modulation de la
notion de proportionnalité non seulement en ce qui concerne la
position de chaque membre au sein du groupe mais aussi par rapport
au groupe comme un ensemble;
- la notion de proportionnalité
concernant des sanctions anti-monopole est assez différente de la
notion mathématique considérant que dans le secteur de sanctions,
les évaluations sous-jacentes à la détermination des classes
homogènes des opérateurs peuvent aussi amener à la modulation de la
relation entre des sommes inspirée sur le principe de progressivité
ou sur le principe de digression et ce, sans modifier l’équilibre ni
violer le principe général de la proportionnalité;
- l’Autorité
pourra légitimement effectuer des modulations de sommes importantes
en termes de progressivité ou digression à condition que ce modus
operandi n’entre pas en conflit avec les principes généraux
d’adéquation et de bon sens (c’est-à-dire, l’Administration pourra
appliquer le critère de proportionnalité progressive dans des
situations où l’augmentation de la part de marché à la disposition
de chaque participant exprime un niveau graduellement croissant de
préjudice potentiel ou effectif pour les intérêts protégés) ;
-
une fois reconnue la légitimité de l’approche conceptuelle fondée
sur le principe de progressivité de la sanction, l’Autorité pourra
légitimement baser sa progression logique sur la dénommée approche
de bas en haut, à savoir, en commençant par la classe d’entreprises
possédant les parts de marché les moins importantes;
- un modèle
de détermination basé sur cette progressivité de bas en haut semble
raisonnablement conçu pour garantir un degré graduellement croissant
et pour empêcher les sanctions anti-monopole et leur application
pratique ne semble pas donner des résultats hors du commun;
Pour
finir nous remarquons que l’approche conceptuelle en question est
également cohérente avec la Notification de la Commission Européenne
du 14 janvier 1998 (Lignes directrices pour Déterminer des
Sanctions), qui n’excluent pas d’avoir recours à un système de
détermination de sanctions basé sur le principe de progressivité ou
de proportionnalité de bas en haut.
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(1) «
Le contrôle judiciaire des sanctions administratives et les délits
dans le droit européen de la concurrence - Forum de discussion »,
Réseau Européen de Formation Judiciaire, Cours virtuel et séminaire
présentiel destinés aux juges sur le droit européen de la
concurrence – Barcelone, Mai 2014.
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(pubblicato il
1.7.2014)
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